Malgré un accident impliquant un tracteur agricole qui très jeune l’a privé de ses jambes, Sébastien Gaudreault cultive encore aujourd’hui du chanvre et de l’avoine sur la terre de ses parents à Saint-Henri-de-Taillon. L’agriculteur paraplégique n’a jamais baissé les bras, faisant preuve de résilience.
L’accident qui a failli lui coûter la vie est survenu alors qu’il n’avait que trois ans. Sébastien Gaudreault était monté pour une première fois à bord d’un tracteur pour accompagner son père. C’était une pratique courante à l’époque, souligne-t-il, mais il n’y avait pas de cabine de protection à ce moment-là.
« J’ai été malchanceux. J’ai arrêté de me tenir agrippé pendant une fraction de commande. Mon père a essayé de me rattraper, mais ça a été la fraction de trop. Je suis tombé juste en avant des grosses roues arrière. Ce dont je me souviens surtout, c’est la pression. Tout mon sang a remonté vers ma tête et je n’étais plus capable de respirer. Mon père pensait que j’étais mort. »
Dès qu’il a pu freiner l’imposante machine, son père l’a pris dans ses bras pour ensuite le conduire à l’hôpital. Ce qui n’a pas empêché Sébastien Gaudreault de remonter à nouveau sur un tracteur par la suite.
« Je voulais continuer à conduire des tracteurs et je suis une tête de mule! Ça ne me faisait pas peur et ça ne m’a jamais traumatisé. J’ai toujours eu un volant dans les mains depuis, que ce soit un VTT, une motoneige, une motomarine ou quoi que ce soit. Je n’ai jamais arrêté. »
Jamais renoncer à son rêve
L’agriculteur paraplégique n’a surtout jamais voulu renoncer à son rêve de prendre la relève de son père.
« Beaucoup de personnes m’ont conseillé de tout vendre et m’en aller en appartement, mais je n’étais pas capable. D’autres personnes m’ont donné des tapes dans le dos en me disant de continuer. J’ai toujours été déterminé. J’aime mieux voir le verre à moitié plein qu’à moitié vide. Il y a des journées que ça ne va pas bien, mais on se dit que le lendemain, ça ira mieux. »
Pour entretenir sa terre, Sébastien Gaudreault reçoit de l’aide à l’occasion, de voisins agriculteurs ou de ses quatre enfants. Il fait preuve d’ingéniosité et utilise ses bras pour monter sur son tracteur à partir de son VTT.
« Je me suis adapté en vieillissant avec mon handicap. Ce n’a pas été si difficile que ça. Les tracteurs sont plus faciles à conduire aujourd’hui. On ne se sert presque plus des pédales. Avant, il fallait appuyer sur l’embrayeur et j’utilisais mes mains, un petit bâton ou des choses comme ça. Je me débrouillais. Je suis capable de faire les semis et la récolte, un peu de mécanique à travers ça. »
L’agriculteur avait aussi de bons parents, comme il dit.
Grandir sur une ferme
« À cette époque, plusieurs parents qui avaient des enfants handicapés les plaçaient dans des centres, mais ma mère a refusé. Elle a pris soin de moi et voulait que j’aie les mêmes chances que les autres. J’ai grandi sur la ferme. »
Sébastien Gaudreault refuse de se plaindre et à 56 ans, il se dit heureux aujourd’hui. Il y a des gens plus malheureux, s’empresse-t-il d’ajouter.
« J’aurais préféré garder mes jambes et ça me limite. Il y a des choses que j’aimerais faire. Mon rêve, c’était de piloter un avion. Il ne faut pas demander l’impossible. Il y a des choses que je ne peux pas faire et il faut l’accepter. Des regrets, ça empêche d’avancer. »