Samedi, 27 juillet 2024

Économie

Temps de lecture : 3 min 42 s

Des défis pour les agriculteurs du Saguenay-Lac-Saint-Jean

Le 16 mai 2024 — Modifié à 16 h 00 min le 16 mai 2024
Par Sara-Léa Bouchard

Les agriculteurs du Saguenay-Lac-Saint-Jean devront composer avec de nombreux défis au cours des prochaines années. Par contre, la production locale d’aliments rencontre un succès croissant.

C’est l’analyse que fait le président de l’Union des producteurs agricoles du Saguenay-Lac-Saint- Jean, Mario Théberge.

De plus en plus, les entreprises agroalimentaires de la région connaissent du succès en affaires et se positionnent sur le marché, en voulant intégrer davantage d’aliments locaux. On pense notamment à Boeuf Alfred de Normandin, à l’avoine transformée par la ferme Olofée de Saint-Félicien, à la Fromagerie Boivin de La Baie ou encore Les Viandes CDS de Chicoutimi. Celles-ci continuent de faire preuve d’innovation et d’adapter leurs produits à la réalité d’aujourd’hui.

« C’est une marque de commerce et je pense que si on veut se démarquer au niveau régional, ça ne sera pas en essayant de faire du lait moins cher. Que tu sois à Montréal, à Québec, à Victoriaville peu importe, du lait c’est du lait. La seule façon qu’on va y arriver, si on veut se démarquer, c’est d’y aller avec une différenciation de nos produits », prêche-t-il.

Il donne l’exemple avec les producteurs de légumes, qui prennent de l’expansion sur le territoire. « Quand le consommateur goûte à ça (produits régionaux) souvent il va y prendre goût, que ce soit du boeuf, du lait, des céréales, ou des légumes. Avec nos Serres Toundra, les concombres, ça goûte chez nous. C’est pour ça aussi que les producteurs de légumes sont de plus en plus ici. »

Bien que ce soit un type de production qui prend de l’ampleur, il n’y en aura pas de facile pour autant, aux dires de Mario Théberge, alors que « c’est le marché local qui va les faire vivre, parce que quand ils vendent dans de grandes chaînes, ils sont toujours obligés d’être en compétition avec des prix dérisoires. Mais si le consommateur adhère à supporter l’agriculture et à bien se nourrir avec des produits régionaux, ça peut être une plus-value pour nos producteurs. »

Se battre pour une aide financière juste et adaptée à la région

Pour Mario Théberge, une autre bataille est à faire pour les producteurs agricoles. Il s’agit de faire pression afin d’obtenir une aide financière suffisante et des programmes d’assurances récolte qui répondent aux besoins actuels du secteur d’activité.

« L’agriculture, c’était là avec nos grands-parents, c’est là aujourd’hui avec nos producteurs actuels et ça va être là encore demain avec nos futures générations. C’est pour cela qu’on a manifesté à Alma, notamment. On est vraiment inquiet pour notre relève agricole. Avec la conjoncture économique, les taux d’intérêt élevés, la main d’œuvre qui est pratiquement inexistante en agriculture, ce sont des normes auxquelles on doit malheureusement se conformer. »

Il qualifie même d’« audacieux » les jeunes voulant prendre la relève d’une entreprise dans ces conditions en 2024. Un autre aspect le déçoit également : le budget alloué par le gouvernement du Québec au secteur de l’agriculture cette année, qui s’élève à moins de 1%. Un élément pour le moins préoccupant, sachant que dans les 50 dernières années, l’autonomie alimentaire du Québec est passée d’environ 75% à 35%, d’après une étude de l’Institut de recherche en économie contemporaine.

Saison

Difficile pour l’instant de prévoir à quoi va ressembler la récolte 2024.

« Il est encore trop tôt pour dire ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas et surtout, ce qui va arriver. Cependant, du côté des semences, ça s’annonce bien, mais pour le foin et les fourrages qui nourrissent nos animaux, c’est trop tôt pour le dire. »

D’abord, l’hiver dans la région fut plus chaud qu’à la normale, et dans les périodes plus douces, la pluie a fait son apparition. Une situation qui n’a pas permis aux cultures de se développer adéquatement.

« Quand il tombe de l’eau l’hiver, il y a plus de chance que l’eau pénètre dans le sol et lorsqu’il fait froid après, des froids assez mordants d’ailleurs, ça fait que le sol gèle à nouveau. Quand une situation comme celle-ci survient, les racines sont vulnérables. Elles finissent par éclater et pourrissent au printemps », mentionne celui qui est la tête de l’organisation depuis neuf ans.

Le printemps se veut jusqu’à maintenant plutôt frais, et les probabilités de pluie semblent encore incertaines.

« Mon grand-père me disait tout le temps, ‘’pour commencer une saison, ça prend une pluie chaude’’. Là, on n’a pas eu ça, une bonne pluie chaude, pour que ça réchauffe le sol et que les plants poursuivent leur croissance. Même avec tous ces éléments, on n’est pas en panique loin de là, mais on est en attente de voir le résultat, ce que tout ça va donner dans les prochaines semaines. »

Il ajoute parallèlement que « les changements climatiques nous amènent à des périodes de plus en plus intenses de sécheresse. Ce qu’on a vécu l’an passé avec les feux de forêt, c’était quelque chose qu’on n’avait jamais vu, et les producteurs n’ont pas eu de foin parce que c’était trop sec. Il n’y a pas de vie sur terre, ni dans le règne animal, ni dans le règne végétal, sans eau. On est toutefois dans de belles conditions pour semer. »

Le Cahier EntrePreneurs est une initiative de Trium Médias, en collaboration avec le journal Les Affaires. Dans les éditions trimestrielles se trouvent des articles touchant directement les enjeux et défis du monde des affaires.

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